Il s'agissait alors d'une activité naissante qui a l'ambition de donner enfin l'éclairage au monde, si ce n'est la lumière .
Elle évolue en effet dans sa forme et vis à vis de qui et de quoi elle s'exerce.
Au début de l'industrie gazière (cf « les pionniers »), il s'agissait pour les différents acteurs de s'assurer des meilleurs clients – salles de spectacle, galeries, grands magasins et cafés, bâtiments publics – et, pour cela, d'user de tous les moyens possibles, y compris de contestables, tels que le rajout d'une canalisation dans une voie déjà canalisée par un concurrent ou de moyens provisoires tels que « le gaz porté ».
A la suite de la promulgation des textes légaux et réglementaires de 1822 et 1824, destinés à éviter l'anarchie dans les villes, chaque société ne peut chasser « le bon client » que sur ses terres. Est-ce à dire qu'elle peut alors le rançonner ? Evidemment non, car elle a dû souscrire à un traité de concession qui impose des tarifs maximaux. Or, ce contrat a le plus souvent donné lieu à compétition en amont entre les sociétés candidates. Ce processus favorise néanmoins les grandes sociétés dans les agglomérations urbaines denses, en raison de leur potentiel technique et financier supérieur et, du coup, laisse un peu de côté les localités modestes où le gaz a plus de mal à se substituer aux combustibles préexistants comme le charbon. Dans ces conditions, et compte tenu de l'allongement considérable des durées de concession - elle atteindra 50 ans à Paris dès 1855 ; puis en 1946, de la constitution de l'EPIC Gaz de France, la concurrence se résumera de plus en plus à une compétition entre énergies pour se tailler la meilleure place possible sur les différents marchés énergétiques. Si l'électricité s'est appropriée la quasi-totalité de l'éclairage public et privé dès le milieu du 20ème siècle, le gaz naturel a gardé, et même souvent développé, des positions solides dans les usages domestiques et commerciaux et parfois aussi constitué la meilleure solution, en raison de ses qualités spécifiques, dans nombre de PME. (cf publication no 9) .
Mais, dès le milieu des années 1990, ce type de concurrence n'est pas jugé suffisant par l'Union Européenne. Il faut que chaque opérateur gazier européen ait accès, sans réserve, à chaque client, quel qu'il soit, et cela sans multiplier les infrastructures. Donc une infrastructure unique qui appelle évidemment un gestionnaire unique par pays et réserve la possibilité pour chaque fournisseur potentiel de gaz de l'utiliser sans restriction pour alimenter les clients qu'il a su rallier. Ces dispositions sont-elles de nature à créer une concurrence correcte et efficace ? Assurément, si l'on peut, au moins statistiquement, répondre positivement aux trois questions suivantes :
• les clients sont-ils mis couramment en situation de comparer les offres des différents opérateurs ?
• Les fournisseurs de gaz à ces opérateurs sont-ils tous correctement rémunérés ?
• Les opérateurs, notamment ceux du type de simples commerçants, achetant en gros en fonction des meilleures opportunités, pour vendre au détail, couvrent-ils les coûts qu'ils génèrent ?
Le bilan reste sans doute à faire.