N° 9 L'ACTIVITE GAZIERE ET LA CONCURRENCE : Après la deuxième guerre mondiale des changements nombreux et profonds

preview

A la libération du pays, il faut tout d'abord remettre en état de marche toutes les concessions gazières où cela est possible, sans investir outre mesure, car les sociétés concessionnaires savent qu'elles n'échapperont pas à la nationalisation inscrite dans le programme du Conseil National de la Résistance. Celle-ci intervient le 8 avril 1946 et concerne le gaz et l'électricité dont les anciennes sociétés à capitaux exclusivement privés sont intégrées dans un Etablissement Public Industriel et Commercial (EPIC) : Gaz de France pour le gaz ; Electricité de France pour l'électricité. L'unité de direction ainsi constituée permet de rationaliser la reprise des concessions. Si une nouvelle usine est nécessaire, elle ne distillera plus du charbon, mais des huiles de pétrole ou bien fournira de l'air propané, directement substituable au gaz traditionnel, parfois même c'est du propane pur, qui sera distribué moyennant les adaptations nécessaires des réseaux et des appareils des abonnés. 

Les ventes croissent rapidement, bien que le gaz n'ait plus d'usages captifs. En effet sa commodité d'emploi, la précision des réglages possibles, son adaptation inégalée aux usages intermittents et aussi son prix raisonnable en font très souvent le meilleur choix, hors éclairage bien sûr, tant pour les particuliers que pour beaucoup de PME. Gaz de France a donc très vite besoin de nouvelles sources de gaz. Simultanément, l'appétit de coke de la sidérurgie et des pouvoirs publics amène à construire de puissantes cokeries et « centrales gazières » dans la région parisienne, dont Alfortville, la plus puissante d'Europe, mais aussi à Rouen et Strasbourg. Dans le même temps, la sidérurgie et les houillères de Lorraine et de la Sarre vont alimenter la région parisienne par une canalisation en acier de 312 km, fonctionnant sous 60 bars : une première en Europe là aussi, rehaussée encore par le stockage en « nappe aquifère » à Beynes d'une partie de ce gaz : le premier stockage souterrain de ce type en France. Mais la divergence des besoins en coke, largement satisfaits, et des besoins en gaz, en forte hausse, nécessite d'autres sources d'approvisionnement. Or, une belle occasion se présente : la découverte en 1951 à Lacq d'un gisement de gaz naturel de grande taille. Mais sa mise en exploitation suppose d'avoir maîtrisé au préalable ses caractéristiques exceptionnelles. En effet, le gaz sort d'un gisement à 3500 mètres de profondeur, à une température de 160o C et à une pression de l'ordre de 500 kg/cm2. En outre, il comporte 15% d'hydrogène sulfuré auquel ne résiste aucun acier alors disponible. Il faudra cinq ans pour y arriver, mais la récompense est là : le pays dispose dès 1956 d'une réserve réelle de 200 milliards de m3 de gaz naturel .

 Désormais une nouvelle ère, où tout change, commence pour les gaziers. Un réseau de grand transport en acier ( 600 mm de diamètre, 67 bars) s'élance vers Paris, Lyon et Nantes. Sur son passage, les usines s'éteignent, les gaziers changent en masse de métiers. Il faut adapter les réseaux de desserte locale et les appareils des clients, ce dernier point n'étant pas une mince affaire orchestrée par un Centre de Changement de Gaz créé en 1957. L'arrivée du gaz naturel dans une localité est une fête où le clou est l'allumage sur la place centrale de la flamme au nouveau gaz, symbole de modernité et du passage du « local » au « national », voire à « l'international ». Désormais, le gaz naturel concentre tous les progrès économiques et techniques et a vocation à se substituer le plus généralement possible sur l'ensemble du territoire aux gaz précédemment distribués. Lacq n'y suffira pas et Gaz de France devra conclure de nombreux contrats donnant accès à des sources étrangères, à savoir, sans compter les achats spot,  9 contrats se chiffrant en milliards de m3 /an,  dont celui aux Pays-Bas qui en atteint 6 milliards.


Please publish modules in offcanvas position.